Réchauffement climatique = plus de précipitations (mais pas en France…)
Quand on pense réchauffement climatique on pense chaleur, assèchement, manque d’eau, désertification.
Mais en réalité le réchauffement climatique va se traduire par plus d’humidité, en moyenne, dans l’atmosphère et plus de précipitations, en moyenne, à la surface de la Terre.
C’est contre-intuitif, n’est-ce pas ? Voyons pourquoi c’est pourtant cela qui va se passer (est en train de se passer, devrais-je dire).
Première chose à avoir en tête : la Terre flotte dans l’espace, elle est entourée de vide, elle est donc matériellement isolée. De ce fait, la quantité de tout ce qu’elle contient comme matière ne change pas(*).
Notamment, la quantité d’eau à la surface de la Terre est stable, cela depuis plusieurs milliards d’années : l’eau ne s’évapore pas dans l’espace, les météorites ne nous en apportent pas et il n’existe pas de processus chimique connu qui en créerait ou en ferait disparaître de manière notable.
Le réchauffement climatique, aussi impactant soit-il, ne changera pas cela : il ne fera pas disparaître d’eau, il ne fera qu’influer sur la répartition de l’eau sur Terre, principalement en modifiant, globalement et localement, le cycle de l’eau.
Pourquoi plus de précipitations ?
Il existe une loi physique très importante en thermodynamique selon laquelle la quantité de vapeur d’eau que peut contenir l’air varie en fonction de la température : plus l’air est chaud et plus il peut contenir de vapeur d’eau.
Or, du fait du réchauffement climatique, la température moyenne de l’atmosphère augmente : déjà plus de 1°C d’augmentation depuis l’ère pré-industrielle, et plusieurs degrés de hausse à prévoir d’ici la fin du XXIème siècle. Cette augmentation de température va donc mécaniquement conduire à ce que la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’air augmente aussi.
Et si l’humidité de l’air augmente, alors les précipitations augmentent aussi car celles-ci sont le résultat de la condensation de l’humidité de l’air.
Le réchauffement climatique va donc provoquer, en moyenne, une augmentation de l’humidité de l’air et de la quantité des précipitations sur Terre.
Attention toutefois : cette augmentation est une moyenne. Et il faut se méfier des moyennes car elles peuvent cacher de grandes disparités. Vous connaissez la fameuse blague « Quand Bill Gates entre dans un bar, en moyenne tous les occupants du bar sont milliardaires… » : elle illustre bien le fait qu’une moyenne est une image de la réalité souvent bien insuffisante pour décrire celle-ci.
Qu’est-ce qui va se passer, concrètement ?
L’augmentation des précipitations sur Terre va en fait se matérialiser globalement de la façon suivante :
– une augmentation des précipitations dans les régions déjà pluvieuses,
– une diminution des précipitations dans les régions déjà sèches.
Cette hétérogénéité en fonction des régions de l’évolution des précipitations est bien restituée par les modèles informatiques de simulation de l’évolution du climat. Voici ci-dessous une cartographie des évolutions prévues, avec le code couleur suivant :
– de vert à bleu : augmentation des précipitations,
– de jaune à rouge : diminution des précipitations.
Remarquez ce qui va se passer au niveau de la ceinture tropicale et de l’Asie du sud-est, déjà très arrosées : ces régions vont connaître une humidité et des précipitations accrues. Et cela va progressivement devenir de plus en plus problématique car ce sont des régions chaudes, or la combinaison température + humidité est particulièrement dangereuse pour l’être humain. En effet, les forts taux d’humidité empêchent la transpiration et l’évacuation de la chaleur par le corps humain.
Le tableau ci-dessus de l’ « indice de chaleur » montre qu’avec un air sec (40% d’humidité) l’être humain peut vivre avec des températures au delà de 40°C sans trop de dommages, alors qu’avec 80% d’humidité, dès 35°C cela devient extrêmement dangereux et même mortel si l’exposition se prolonge plus que quelques heures.
[Pour l’anecdote, c’est la raison pour laquelle l’air des saunas peut être bien plus chaud (jusqu’à 100°C) que celui des hammams (maxi 50°C) : l’air y est sec et la transpiration s’évapore très rapidement, alors qu’il est saturé d’humidité dans les hammams ce qui entraîne une absence d’évaporation de la transpiration. Dans tous les cas le temps de station dans les saunas et hammams est limité, on comprend pourquoi…]
Voici des cartes du monde représentant le nombre de jours dans l’année au cours desquels la combinaison chaleur et humidité dépasse(ra) les seuils de dangerosité :
– carte a « Historical » = situation actuelle
– carte b « RCP 2.6 » = situation en 2100 (scénario GIEC optimiste)
– carte c « RCP 4.5 » = situation en 2100 (scénario GIEC intermédiaire)
– carte d « RCP 8.5 = situation en 2100 (scénario GIEC si on ne change rien)
A terme, si nous ne jugulons pas fortement le réchauffement climatique global, des régions entières deviendront inhabitables une grande partie de l’année…
Et en France ?
Pour ce qui est de nos régions, la carte des précipitations montre que l’ensemble du bassin méditerranéen connaîtra un assèchement, y compris la France.
D’ici la fin du siècle, c’est environ 50% de la France qui devrait passer en climat méditerranéen, jusque-là limité au sud-est de la France.
A noter que malgré l’assèchement général, le sud-est de la France devrait pourtant connaître des précipitations plus intenses au moment des épisodes méditerranéen. Toujours l’effet trompeur des moyennes : les précipitations annuelles vont diminuer en moyenne mais les pics de précipitations de l’automne vont augmenter. Au sujet des épisodes méditerranéens, vous pouvez (re)lire mon article dédié.
Voici, issu de cet article de Météo-France, les cartes de l’évolution future de la sécheresse des sols en France par rapport à aujourd’hui, à différents horizons de temps et pour différents scénarios GIEC d’évolution du climat (intermédiaire, pessimiste, optimiste) :
Très nettement, il apparaît que sur quasiment tout le territoire, les sols vont devenir bien plus secs. Cela aura bien sûr des conséquences importantes sur la végétation sauvage (dépérissement d’espèces) et sur l’agriculture (baisse des rendements).
Voilà, cet article vous donne une petite idée de ce qui nous attends si on ne fait rien pour lutter contre le réchauffement climatique.
Et soyons lucides, pour l’instant… on ne fait rien. Ou pas grand chose. Ou pas assez, vraiment pas assez.
Pour finir, je vous conseille :
- Cet excellent article de vulgarisation sur le site BonPote, publié le 6 avril : « La sécheresse, enjeu majeur du changement climatique en France ?«
- L’édition du 6 avril de l’émission La Tête au carré « Climat : les scientifiques confirment l’urgence » dans laquelle est notamment interviewé Christophe Cassou, climatologue, un des auteurs du dernier rapport du GIEC qui sera publié en juillet 2021.
Cette émission fait le point de manière claire et simple sur les connaissances scientifiques actuelles relatives au changement climatique.
(*) La quantité de matière que contient la Terre est constante : environ 6 000 000 000 000 000 000 000 000 kg.
S’y ajoutent quelques dizaines de tonnes de météorites qui tombent chaque année sur Terre.
Hormis les fragments terrestres qui pourraient être projetés dans l’espace en cas de chute d’un très gros astéroïde sur Terre (mais on ne va pas y attarder, hein, et plutôt imaginer que ça n’arrivera pas avant longtemps) et une très très légère évaporation dans l’espace de certains atomes légers de l’atmosphère (hydrogène et hélium), la Terre ne perd pas de matière.
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on peut craindre le pire dans les décénies à venir !!!
pauvres vers de terre , il va leur falloir des marteaux-piqueurs pour construire leurs galeries …