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Il semble qu’il fait plus frais lorsqu’on est à l’ombre d’un arbre que lorsqu’on est à l’ombre d’un parasol, d’un toit ou d’un mur, vous avez remarqué ? Est-ce seulement une impression ou bien fait-il effectivement plus frais sous les arbres ?

Et bien ce n’est pas qu’une impression, c’est bien réel : l’air ambiant sous un couvert d’arbres peut être plus frais de plusieurs degrés (de 2 à 8°C dans certaines conditions) que l’air alentour. En entrant dans une forêt par une chaude journée d’été, on s’en rend bien compte : le sentiment de fraîcheur est net.

Comment cela s’explique-t-il ? Allons voir cela !

Pour comprendre, il faut s’intéresser au fonctionnement général d’un arbre (qui est aussi celui de toutes les plantes, mais nous allons dans cet article nous concentrer sur les arbres).

Les arbres pompent l’eau du sol à l’aide de leurs racines, OK. Et ensuite ? Et bien chaque arbre contient un ensemble de « canaux » verticaux, similaires à des tuyaux, qui s’appelle le xylème.  Ces canaux relient les racines aux feuilles des arbres.  Ils sont le siège d’un mouvement  permanent d’eau (de sève en fait, car l’eau est additionnée de nutriments extraits du sol) du bas vers le haut, du sol vers les feuilles.

Ainsi l’eau du sol entre dans les racines, monte dans les canaux de sève jusqu’aux feuilles et là… s’évapore dans l’atmosphère, en passant par les « stomates », petites ouvertures rétractables à la surface des feuilles.

Les volumes d’eau qui transitent ainsi sont très important : 75 litres par jour pour un bouleau, plusieurs centaines de litres par jour pour un arbre plus important en taille, jusqu’à 1000 litres par jour pour un chêne.

Stomate à la surface d’une feuille.
Taille de l’ouverture : quelques millièmes de millimètres.

A ce stade de l’explication, une question devrait vous intriguer : quel est le moteur de ce mouvement d’eau ?? D’où vient l’énergie nécessaire pour que l’arbre soit capable d’aspirer et faire monter l’eau du sol à plusieurs mètres d’altitude ?

Et bien cette énergie vient du soleil : celui-ci éclaire les feuilles des arbres et la chaleur de ses rayons fait évaporer l’eau à l’intérieur des feuilles. La vapeur d’eau ainsi produite sort ensuite dans l’atmosphère par les stomates. Et là, ce qui se passe – attention concentrez-vous – c’est que les lois de la physique sont ainsi faites que le manque d’eau provoqué dans les feuilles par l’évaporation provoque une dépression au niveau du sommet de la colonne d’eau (de sève), dépression qui se propage vers le bas dans toute la colonne. La colonne d’eau reste entière et ne se « casse » pas, même si elle est « tirée » vers le haut, car des forces de cohésion chimique relient les molécules d’eau entre elles. Ainsi toute la colonne d’eau est aspirée vers le haut (analogie : en créant une dépression avec votre bouche au sommet d’une paille, vous aspirez l’eau et celle-ci monte depuis le verre vers votre bouche !).

Ce mécanisme physique d’aspiration est très puissant, il est le « moteur » de ce mouvement d’eau ascendant qui a pour effet d’aspirer l’eau (et les nutriments) du sol, la(les) faire monter dans l’arbre – en le nourrissant au passage – avant que l’eau ne soit rejetée sous forme de vapeur par les feuilles.
Trop forts les arbres, non ??

Revenons maintenant à notre histoire de température. D’où vient qu’il fasse plus frais sous les arbres ?

Et bien encore une fois ce sont les lois de la physique qui vont nous donner l’explication. Il se trouve que l’évaporation de l’eau est un phénomène qui a besoin d’énergie, sous forme de chaleur, pour se produire : nous savons par exemple que la meilleure façon d’évaporer plus rapidement l’eau d’une casserole est de chauffer celle-ci, non ?
Les phénomènes de ce type sont appelés des phénomènes « endothermiques » : qui ont besoin de chaleur (par opposition aux phénomènes « exothermiques » : qui produisent de la chaleur).

Lorsqu’un phénomène endothermique, donc consommateur de chaleur, se produit quelque part, que se passe-t-il ? Il a pour conséquence de refroidir les alentours immédiats car pour s’alimenter il « prend » la chaleur environnante. L’évaporation de l’eau est un phénomène refroidissant !
Nous, êtres vivants à température constante, lui devons d’ailleurs notre survie quand il fait chaud : c’est (entre autres) grâce à l’évaporation de notre transpiration à la surface de notre peau que nous nous refroidissons…

Voilà donc la clé de compréhension principale : l’évaporation de l’eau au niveau des feuilles des arbres refroidit les feuilles et l’air autour de celles-ci. Puis l’air refroidi, un peu plus lourd que l’air ambiant, « coule » doucement vers le bas et provoque donc au pied des arbres cette fraîcheur si appréciable les journées chaudes.

A cela il faut ajouter un autre phénomène : au niveau du sol, au pied des arbres, l’eau s’évapore aussi, passant directement du sol à l’atmosphère, contribuant aussi à rafraîchir l’air au niveau du sol.

La combinaison des deux phénomènes (transpiration au niveau des feuilles et évaporation directement au niveau du sol) porte un nom : l’évapotranspiration.

Voilà, c’est grâce à cette « évapotranspiration » qu’il fait plus frais sous les arbres :-)